Les habits neufs de la duchesse
Thomas Gainsborough, Giorgiana, Duchess of Devonshire, 1773
Dans les films en costumes, tout se passe comme si un pacte tacite se faisait entre le spectateur et le film lui-même : regardons ensemble par le petit bout de la lorgnette des personnages qui, assurément, ont eu une autre vie que celle qui est donnée à voir, durée du film oblige. Laissons-leur cette éclatante aura de modernité qui nous rassure et nous fait rêver, ou nous donne la larme à l'oeil, à nous, étranges duchesses rêvées du XXIème siècle... Oublions les odeurs musquées, les dents cariées.
Et cela fonctionne à merveille. N'avez-vous pas rêvé aux toilettes somptueuses de Keira Knightley dans l'adaptation au cinéma de la récente biographie de la Duchesse du Devonshire par Amanda Foreman? Ecrasé une larme lors de la remise de l'enfant adultérin? Soupiré de soulagement à la vue des amours assumées de la jeune femme? Mais si, et en cela le film est réussi, car il donne à rêver. Comme donnent à rêver les portraits de femmes du XVIIIème siècle, devant lesquels on peut s'abîmer dans quelque musée au parquet résonnant.
Impossible de ne pas faire un lien avec le Marie-Antoinette de Sofia Coppola, reconstitution à la liberté assumée, et qui donne à voir un personnage de femme spectatrice éberluée et comme absente de sa propre destinée. Au narrateur omniscient de The Duchess, on opposera les points de vues mouvants de Marie-Antoinette.
Et l'on restera par dessus tout séduit par les costumes, les décors, les images d'un film dont chaque plan ou presque pourrait devenir une charmante et délicate miniature.